Si vous êtes associé d’une Société Civile Immobilière (SCI), vous avez peut-être entendu parler du démembrement de la propriété des parts sociales. Mais qu’est-ce que cela signifie exactement ? Quels sont les avantages et les inconvénients d’une telle opération ? Et comment pouvez-vous procéder ? Voici tout ce que vous devez savoir à ce sujet !
Définition et principe de la Société civile immobilière (SCI)
Une Société Civile Immobilière (SCI) est une structure juridique qui a pour objectif de gérer un ou plusieurs biens immobiliers.
Plus concrètement, voici les éléments essentiels concernant une SCI :
- Capital social : La SCI dispose d’un capital social constitué par les apports réalisés par chaque associé, que ce soit en numéraire ou en nature. Ce capital social est divisé en parts sociales, qui représentent la propriété des associés au sein de la société.
- Personnalité morale : La SCI possède une personnalité morale distincte de ses associés, ce qui signifie qu’elle a des droits et des obligations propres. Elle est une entité juridique à part entière.
- Patrimoine distinct : La SCI bénéficie d’un patrimoine distinct de celui de ses associés. Ce patrimoine est composé des biens immobiliers détenus par la société.
- Statuts : Des statuts définissent le fonctionnement interne de la SCI et les règles de prise de décision au sein de la société.
- Gestion et responsabilité des associés : La SCI est administrée par un gérant désigné. Les associés de la SCI sont responsables indéfiniment des dettes sociales, en fonction de leur part respective dans le capital social. (1)
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Pourquoi avoir recours à une SCI ?
La création d’une Société Civile Immobilière (SCI) présente de nombreux avantages.
En effet, lorsqu’il y a plusieurs propriétaires d’un même bien immobilier, tels qu’un achat en commun ou une succession, le régime juridique de l’indivision est généralement appliqué. Cependant, ce régime peut être contraignant car il nécessite un accord entre les propriétaires indivisaires pour prendre des décisions importantes.
En cas de désaccord persistant, la situation peut se bloquer. Cela entraîne des pertes de temps et d’argent considérables, et éventuellement nécessitant l’intervention d’un juge.
Pour éviter l’application du régime de l’indivision, les propriétaires peuvent choisir de créer une SCI dont ils deviendront tous associés.
Dans ce cas, la société devient propriétaire du bien immobilier. Les décisions sont prises conformément aux règles de majorité établies par les statuts de la SCI, ce qui facilite la gestion du bien et réduit considérablement les risques de blocage.
De plus, la création d’une SCI dans cette situation permet également de contrôler l’entrée éventuelle de futurs associés. En insérant une clause d’agrément dans les statuts, les associés existants ont la possibilité de s’opposer à l’arrivée d’associés non choisis. Par exemple, en cas de décès.
Les sociétés civiles immobilières (SCI) familiales suscitent un vif intérêt
La mise en place d’une Société Civile Immobilière (SCI) familiale peut être considérée comme une stratégie pour :
- Structurer la détention et la gestion d’un bien immobilier au sein de la famille.
- Assurer la transmission sécurisée d’un bien immobilier aux enfants. Notamment lorsque les parts sociales de la société sont soumises à un démembrement.
Comment démembrer la propriété des parts d’une SCI ?
Le démembrement de propriété se réfère à la situation où la pleine propriété d’un bien immobilier est partagée entre plusieurs personnes.
Plus concrètement, cela signifie que la jouissance du bien (appelée “usufruit”) est séparée de la nue-propriété de ce même bien.
Dans le cadre d’un démembrement de propriété, on distingue :
- L’usufruitier, qui a le droit de profiter du bien lui-même, par exemple en l’occupant, et de percevoir les revenus générés par le bien, tels que les loyers s’il est loué. Toutefois, l’usufruitier ne possède pas la nue-propriété du bien.
- Le nu-propriétaire, peut vendre, modifier ou même détruire le bien, sans toutefois en jouir directement.
Ainsi, le démembrement de propriété permet de séparer les droits d’usage et de jouissance du bien (usufruit) et des droits de disposition sur le bien (nue-propriété).
SCI : nue-propriété et usufruit des parts sociales
Lorsqu’il s’agit d’un démembrement de parts sociales, la division de la propriété ne concerne pas directement le bien immobilier, mais plutôt les parts sociales de la société.
Lorsqu’un même associé détient à la fois l’usufruit et la nue-propriété d’une part sociale, on dit qu’il détient la pleine propriété de cette part sociale (agissant à la fois en tant qu’usufruitier et nu-propriétaire).
Le démembrement de la propriété des parts sociales d’une SCI peut présenter de nombreux avantages, tant sur le plan juridique que fiscal.
Pourquoi démembrer la propriété des parts d’une SCI ?
Le démembrement de la propriété des parts sociales d’une SCI peut être envisagé comme un moyen de transmettre progressivement et de manière contrôlée un bien immobilier à ses enfants.
En effet, des parents associés d’une SCI détenant un bien immobilier peuvent souhaiter transmettre la propriété de leurs parts sociales à leurs enfants de manière échelonnée. Dans cette optique, ils peuvent décider de donner uniquement la nue-propriété des parts sociales de la SCI à leurs enfants, tout en modifiant les statuts de la SCI pour élargir leur pouvoir de décision en tant qu’usufruitiers. Par exemple, cela leur permettrait d’avoir un droit de vote lors de certaines décisions.
Ainsi, en tant qu’usufruitiers, ils conservent le contrôle des décisions au sein de la SCI tout en assurant la transmission de la pleine propriété des parts à leurs enfants au moment de leur décès, lorsque l’usufruit prend fin.
Concrètement, la détention des parts sociales (transmise aux enfants sous forme de nue-propriété des parts) est dissociée du pouvoir de décision au sein de la SCI. Ce dernier reste entre les mains des parents usufruitiers.
Du point de vue fiscal :
Le démembrement de la propriété des parts sociales de la SCI par les parents peut également présenter des avantages.
Il convient de rappeler que chaque parent peut bénéficier, tous les 15 ans, d’un abattement de 100 000 euros lorsqu’il fait une donation à un enfant (appelé “abattement en ligne directe”) (2).
Le démembrement de la propriété des parts sociales de la SCI permet aux parents de transmettre progressivement la nue-propriété des parts à leurs enfants, en contrôlant la valeur transmise afin de respecter ce plafond de 100 000 euros.
Au décès des parents, les enfants récupéreront la pleine propriété des parts après l’extinction naturelle de l’usufruit des parents suite à leur décès, sans avoir généralement à payer d’impôt supplémentaire (3).
SCI : le cas du démembrement croisé
De la même manière, le démembrement de parts sociales d’une SCI peut être envisagé par deux concubins qui détiennent ensemble un bien immobilier et qui souhaitent se protéger mutuellement en cas de décès (ce que l’on appelle un “démembrement croisé“).
Prenons l’exemple de deux concubins qui ont acheté leur résidence principale via une SCI dont ils sont tous deux associés.
Initialement, chacun des concubins détient la pleine propriété de la moitié des parts sociales.
Pour protéger leurs droits respectifs en cas de décès, les concubins peuvent opter pour un démembrement croisé de propriété de leurs parts sociales : concrètement, chacun donne l’usufruit de ses parts à l’autre.
Au décès de l’un d’entre eux, l’usufruit portant sur les parts sociales du survivant (détenu par le défunt) s’éteint automatiquement. Le survivant récupère ainsi la pleine propriété de la moitié des parts sociales (qu’il détenait initialement) sans avoir à payer d’impôt supplémentaire, tout en conservant l’usufruit des parts du défunt.
De cette manière, en tant qu’usufruitier, le survivant peut continuer à occuper librement le bien immobilier sans avoir à obtenir l’accord des héritiers du défunt, qui ne détiennent que la nue-propriété de la moitié des parts sociales de la SCI.
Les risques du démembrement de parts d’une SCI
Peut-on prendre des mesures de précaution ?
L’idée de démembrer la propriété des parts sociales d’une SCI puisse sembler attrayante. Cependant, il est important de prendre conscience des conséquences significatives qui en découlent.
Tout d’abord, cela nécessite une rédaction précise des statuts de la SCI, ou une adaptation de leur rédaction existante, afin qu’ils soient en conformité :
- d’une part, avec la réglementation régissant le fonctionnement d’une SCI ;
- d’autre part, avec les souhaits des associés de la SCI.
Attention à l’abus de droit lors du démembrement de la propriété des parts d’une SCI
Il est important de noter que cette décision peut attirer l’attention de l’administration fiscale, qui pourrait considérer, selon les circonstances, qu’il s’agit d’un abus de droit.
Pour rappel, sont constitutifs d’un abus de droit les actes (4) :
- Qui sont de nature fictive ;
- Qui ne sont motivés par aucun autre motif que celui d’éviter ou de réduire les charges fiscales que l’intéressé aurait normalement dû supporter si ces actes n’avaient pas été réalisés.
Afin de sécuriser le démembrement des parts sociales d’une SCI, il est recommandé de faire appel à un notaire.
Article rédigé par Juritravail
Références :
(1) Article 1857 du Code civil
(2) Article 779 du Code général des impôts
(3) Article 1133 du Code général des impôts, BOI-ENR-DMTG-10-10-10-20
(4) Article L64 du Livre des procédures fiscales